Rebasing national 2025: derrière la bouffée d’air statistique, les vrais défis du Sénégal

Jeudi 27 novembre 2025 – Le rebasing national 2025 a révélé un PIB réévalué de 15 261 à 17 316 milliards de FCFA, soit une hausse mécanique d’environ 13,5 % grâce au changement d’année de base, passant de 2014 à 2021. Si cette révision améliore plusieurs ratios macroéconomiques, elle ne traduit pas une croissance économique réelle soudaine, mais plutôt un rattrapage statistique nécessaire pour refléter plus fidèlement l’économie sénégalaise.


Rédigé par Kamalenba le Jeudi 27 Novembre 2025 à 02:20

Un rattrapage statistique, pas un gain économique réel

La réévaluation permet de constater des améliorations apparentes :

Dette publique rapportée au PIB : de 90,8 % (2014) à 80,0 % (2021) ;

Taux de pression fiscale : de 18,0 % à 15,9 % ;

Déficit global : de –13,3 % à –11,8 % ;

Solde extérieur courant : de –12,1 % à –10,7 %.

Mais ces chiffres reflètent surtout une mise à jour statistique. Le rebasing intègre désormais le secteur informel, les nouvelles branches productives (mobile-money, certaines activités minières et services), et réajuste la structure sectorielle : le tertiaire représente désormais 53,4 % du PIB, tandis que l’industrie recule légèrement et le primaire reste stable.

Une tendance africaine

Le Sénégal suit une dynamique continentale. Le Nigeria avait vu son PIB bondir de 89 % lors d’un précédent rebasing, le Ghana de plus de 20 %, et plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest ont entrepris des révisions similaires. Ces ajustements offrent une bouffée d’air statistique, améliorent les ratios et peuvent temporairement renforcer la confiance des investisseurs, mais les marchés distinguent désormais rattrapage statistique et progrès économique réel.

La limite du rebasing

Si les ratios paraissent plus favorables, la dette reste la dette, les recettes restent contraintes et les besoins de financement élevés. La nouvelle base statistique ne résout pas les tensions macroéconomiques, ni les défis structurels de l’économie : dépendance aux hydrocarbures, recettes fiscales insuffisantes, dépenses rigides, et volatilité des ressources naturelles.

Pour transformer ce rebasing en gains réels, il faudra :

Consolider les finances publiques : hiérarchisation des projets, réduction des dépenses improductives, gestion proactive de la dette ;

Renforcer le rendement fiscal : lutter contre l’évasion, élargir l’assiette, digitaliser le recouvrement ;

Développer un tissu économique résilient et inclusif : au-delà des secteurs “médiatiquement visibles” comme le mobile-money ou le pétrole.

Un tremplin ou un écran de fumée ?

Le rebasing 2025 de l’ANSD est avant tout un outil de vérité statistique, pas une promesse de prospérité. Son impact dépendra des choix de politique économique, de la gouvernance et des réformes structurelles mises en œuvre. L’enjeu est clair : faire du rebasing un tremplin pour la croissance et non un simple écran de fumée, garantissant ainsi la crédibilité et la résilience de l’économie sénégalaise.

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