Les dimanches de l’histoire: le courage ultime de Baïdy Kathié Pam face à l’humiliation coloniale

Le 10 septembre 1890, à Podor, un jeune soldat torodo du nom de Baïdy Kathié Pam refuse de plier sous l’ordre colonial. Né en 1864 à Guia, près de Podor, il a 26 ans lorsqu’il est conduit, les mains liées, sur la place du fort. Devant la foule, il fait face à la mort avec calme et dignité. Ce jour-là, c’est plus qu’un homme que l’on exécute : c’est un symbole de résistance.


Rédigé par Kamalenba le Dimanche 9 Novembre 2025 à 20:57

Tout commence quelques jours plus tôt. L’administrateur colonial Abel Jeandet, en mission dans le Fouta, prépare l’arrestation de l’Almamy Abdoul Bocar Kane. Dans son escorte, Baïdy Kathié Pam, soldat du Lam Toro, se révolte intérieurement contre l’idée de combattre un parent foutanké au profit d’un colon. Ses doutes se transforment en défi ouvert.

Lorsque Jeandet apprend la trahison morale de son soldat, il le punit d’une manière destinée à humilier : porter ses bagages devant son propre village. Pour un Torodo, l’humiliation vaut la mort. Quelques jours plus tard, à Aéré Lao, Jeandet frappe Baïdy au visage. En retour, celui-ci tire : « Reçois cette balle que tu mérites, toi homme de l’enfer. »

Arrêté puis condamné à mort, Baïdy affronte le bourreau le 10 septembre. Avant de mourir, il déclare :

« Je meurs très jeune, mais la tête haute ici-bas et dans l’au-delà. »

Les colons veulent faire de sa mort un avertissement : sa tête est exposée sur une pique à l’entrée de Podor. Mais la population veille. De nuit, des pêcheurs repêchent le corps, et des habitants finissent par enterrer la tête au cimetière de Thioffi.

Aujourd’hui encore, un ravin à l’entrée de Podor porte son nom : Thiatngol Baïdy. Sa mémoire demeure dans la maxime pulaar :

« Torodo yida gasthié, poulo hoynétaké »
(« Le Torodo hait l’humiliation, le déshonneur. »)

Baïdy Kathié Pam n’était pas un héros de légende, mais un homme libre qui refusa de se soumettre. Son geste continue de résonner comme une leçon de dignité et de courage sur les rives du fleuve Sénégal.

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