L’ancien parlementaire Moustapha Diakhaté a été placé sous mandat de dépôt le 11 juin 2025 pour « offense au chef de l’État » après avoir utilisé le terme gougnafier. Quant à Ousmane Sonko, Premier ministre et président du parti Pastef, il a employé le mot fumier en s’en prenant ouvertement à une partie de la société civile, lors du conseil national de son parti.
Dans un contexte politique tendu, le choix des mots n’est jamais neutre. Ces termes, au-delà de leur charge émotionnelle, méritent d’être analysés pour mieux comprendre leur impact.
Que signifie « Gougnafier » ?
D’après les spécialistes de la langue française, « gougnafier » est un mot familier et péjoratif qui désigne une personne malpropre, grossière, sans gêne ou mal élevée. Par extension, il peut aussi décrire quelqu’un de peu fiable ou maladroit, qui fait mal son travail ou qui agit de manière peu respectable.
Il peut être utilisé de manière sérieuse ou moqueuse, parfois même avec une connotation affectueuse dans un cadre privé :
« Encore un coup de ce gougnafier de voisin ! »
« Ne sois pas un gougnafier, tiens-toi bien ! »
Mais dans un cadre politique, l’expression prend une toute autre ampleur et peut être perçue comme une attaque frontale.
« Fumier », un mot plus violent
À l’inverse, le mot « fumier » est perçu comme une insulte beaucoup plus forte et méprisante. S’il désigne à l’origine un engrais naturel fait de déjections animales, son usage en tant qu’insulte est particulièrement agressif. Il équivaut à traiter quelqu’un de saleté humaine, de pourriture morale.
Selon un professeur de lettres interrogé, « fumier » est un terme brutal, destiné à humilier ou rabaisser totalement l’autre. Dans le contexte d’un discours politique, son emploi vise souvent à délégitimer totalement l’interlocuteur ou le groupe visé.
Le poids des mots en politique
L’usage de tels mots dans l’espace public traduit une forme de radicalisation du langage politique. Ce glissement sémantique interroge : jusqu’où peut-on aller dans la virulence verbale sans franchir les limites de l’éthique démocratique ?
Alors que la société sénégalaise est réputée pour sa culture du dialogue et du respect, ces nouveaux termes posent question. Faut-il s’inquiéter de la banalisation d’un langage d’insulte dans les discours politiques ? Ou y voir une nouvelle forme de communication plus directe, plus percutante, mais aussi plus risquée ?